L’été des enfants

Fut un temps où l’approche de la période estivale créait un immense élan de joie. Enfin le moment de l’année où l’on pourrait faire relâche du train train quotidien et de ses obligations en s’adonnant à une série de jeux improvisés avec ce que notre regard croisait et nos mains transformaient en tout et en rien.

Signe des temps qui courent, et souvent bien plus par obligation que décision de la part des parents, l’été des enfants est de plus en plus structuré par des cours, la gardienne, les camps, les stages, etc. Pour la majorité des enfants et des parents, vacances d’été riment maintenant avec agitation et non excitation.

Comme adulte, nous apprécions généralement un moment de vacances pour se ressourcer les axes (corporel, intellectuel et affectif). Un temps d’arrêt du faire,faire,faire demeure salutaire pour un retour à l’être et rebâtir ses énergies. Force est d’admettre qu’il en est ainsi pour les enfants.

La société de « pèreformance » et de « mèreformance » à laquelle nous contribuons largement jette, de plus en plus, un regard perplexe et embarrassé sur la présence de temps libre dans l’été des enfants. Nous nous éloignons du besoin qu’ont les enfants de jouer et leur inculquons celui de suivre l’horaire au détriment de la création. L’encadrement est certes nécessaire pour l’évolution de nos enfants, mais le sur-encadrement tend à favoriser davantage la dépendance que l’autonomie.

Soustraire les enfants au rythme effréné de la vie d’aujourd’hui quelques jours, quelques semaines par année m’apparaît, dans la mesure du possible, être une saine approche. Admettons que l’enfant ait conservé sa capacité à se désintoxiquer du FAIRE et accéder aux forces de son ÊTRE afin d’explorer le temps et l’environnement d’une façon moins structurée. Ce sont ses trois axes (corporel, intellectuel et affectif) qui se régénéreront à leur propre rythme et engrangeront l’énergie nécessaire au nouveau défi de la prochaine rentrée scolaire, de la prochaine année.

Dans toute cette équation, ça prend aussi un ou des parents ou personnes significatives qui soient prêtes, en accompagnant les enfants, à vivre la même expérience d’abandon d’horaire plus que saturé. Ici, apprendre à laisser les jugements sévères de certains gens très occupés à performer demeure primordial. Malheureusement, cette expérience s’avère souvent douloureuse, contraignante et dissuasive pour quiconque veut accompagner un enfant à vivre des instants à son propre rythme.

L’enfant a besoin d’exemples, de capitaine, de modèles et de coach qui lui permettront de redécouvrir les joies et multiples bénéfices des jeux spontanés hors du temps imposé. Jeux à travers desquels les enfants se construisent davantage sur ce qu’ils SONT bien plus que ce qu’ils FONT. Combien de parents capables de résister à cette obsession du FAIRE et d’accompagner leurs enfants dans la découverte des forces de l’ÊTRE reste-t-il ?

La majeure partie du problème est loin de concerner les enfants eux-mêmes, quoique de plus en plus de ceux-ci ont de la difficulté à accéder aux joies de l’ÊTRE et se sevrer partiellement du FAIRE. Beaucoup de parents sont fatigués, épuisés et/ou n’ont pas le temps, pris eux aussi dans un tourbillon de vie trop rapide, pour pouvoir s’émerveiller sur les douces subtilités des changements de leurs enfants et encore moins sentir d’avoir du temps de qualité à partager. Dans ce contexte, l’été et ses potentiels moments libres se transforme en une source de préoccupations et même d’anxiété.

Afin de créer des conditions gagnants-gagnants et pour les enfants et pour les parents, ceux-ci doivent envisager leur été ou les moments de l’été avec l’enfant comme un privilège, un cadeau, un plaisir et pourquoi pas une passion. Par surcroît, le parent doit disposer d’une réserve d’énergie suffisante afin d’accompagner sainement son enfant dans un quotidien ou l’espace pour ÊTRE est permis.

S’éloigner du culte de la performance, permettre à l’enfant de vivre, de courir, de dormir, de rire, de redécouvrir à son rythme, son ÊTRE, sa force, sa vitalité dans un contexte d’une liberté d’horaire demeure non seulement un cadeau incommensurable pour son présent et aussi un héritage pour son futur et la propulsion de son potentiel d’ÊTRE et de FAIRE.

Lorsque vous permettez à un enfant d’entrer dans un état de « flow », vous lui permettez aussi de devenir votre meilleur professeur, il vous enseignera spontanément comment FAIRE pour l’aider à ÊTRE davantage.

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